Le quotidien « Het Laatste Nieuws » revient sur ma question à la Ministre de la Santé, Maggie De Block, à propos du nombre (toujours élevé) d’enfants intoxiqués suite à l’ingestion de pastilles à lessiver. Je lui ai demandé les actions que pouvait mener notre pays afin de continuer à diminuer le nombre d’accidents annuels ; où en était précisément la réglementation européenne actuelle ; et enfin, quand les pastilles « transparentes » allaient être retirées du marché (ces pastilles, pouvant être perçues comme des bonbons par les plus petits, sont reconnues comme un facteur accroissant le risque d’ingestion).
Cette question a été reprise pour un article du journal « Het Laatste Nieuws » ce 23 novembre 2016 (photo).
Retrouvez, ci-dessous, ma question complète ainsi que la réponse de la Ministre.
Bonne lecture !
Question : L’intoxication des enfants par ingestion de pastilles à lessiver.
Madame la Ministre,
Le Centre Antipoisons a récemment révélé une statistique assez inquiétante : la recrudescence du nombre d’appels pour cause d’ingestion de pastille vaisselle (ou à lessiver) par un enfant. Il y aurait eu près de 300 appels en 2015, presque un par jour.
« Il y aurait près de 300 appels en 2015, presque un par jour ! »
Des mesures de protection et l’encouragement à tenir ces produits hors de portée des enfants sont nécessaires mais ne paraissent peut-être pas suffisantes. Selon mes informations, il semble qu’une nouvelle réglementation européenne viserait à obliger les producteurs à ne plus produire les pastilles de façon transparente. L’objectif étant que celles-ci ne puissent être confondues avec des bonbons par les enfants.
Dès lors, Madame la Ministre, permettez-moi de vous adresser ces quelques questions :
- Quelles actions, la Belgique pourrait-elle mener afin de réduire ce nombre d’accidents?
- Où en est actuellement et précisément la réglementation européenne en la matière?
- Si un changement vers des pastilles exclusivement opaques est en cours, à partir de quand pourrait-on voir disparaître les pastilles transparentes?
Réponse de Maggie De Block,
Ministre de la Santé :
En Europe et aux Etats-Unis, les centres antipoisons ont constaté que les appels pour les lessives liquides présentées en capsules hydrosolubles entraînaient plus souvent des symptômes en cas d’accident que les lessives en gel, en comprimés ou en poudre.
Entre le premier janvier et le 31 décembre 2015, le Centre Antipoisons belge a reçu 320 appels pour 292 cas d’exposition aux lessives liquides en capsules. Mis à part 5 cas d’ exposition chez l’animal, ces appels concernaient une exposition chez l’homme. Les 287 cas d’exposition chez l’homme ont impliqué 17 adulte et 270 enfants. 76% des victimes ont moins de cinq ans. Dans la plupart des cas, le produit a été porté à la bouche.
« les cas d’exposition ont impliqué 17 adultes et 270 enfants,
76% des victimes ont moins de 5 ans »
Le nombre d’accidents est comparable à celui observé durant l’année 2014 : durant cette période, le Centre Antipoisons avait enregistré 281 accidents avec les capsules de lessive. Le profil des accidents est resté inchangé.
L’Irlande a été le premier pays lanceur d’alerte pour ce type de produits en Europe, ce type de conditionnement y étant apparu beaucoup plus tôt qu’en Belgique. Suite à cette alerte et aux nombreux cas enregistrés par les différents Centres Antipoisons européens des mesures réglementaires ont été prises au niveau européen pour rendre les conditionnements de ces produits moins attractif et augmenter la résistance des capsules.
S’agissant d’une matière européenne, les mesures doivent être prises à un niveau européen. Afin d’entériner les discussions, une section a été ajoutée à l’annexe II, partie 3, du règlement (CE) n° 1272/2008 (règlement européen sur la classification, l’étiquetage et l’emballage des substances et des mélanges). Cette nouvelle section réglementaire impose un emballage extérieur opaque ou foncé, un conteneur refermable difficile à ouvrir par de jeunes enfants ainsi qu’un emballage soluble contenant un agent d’aversion incitant à recracher. De plus cet emballage soluble doit être résistant à une pression de 300 N et doit conserver son contenu liquide pendant au moins 30 secondes lorsqu’il est placé dans une eau à 20°C. Il faut toutefois souligner que ces mesures ne modifient pas le pouvoir irritant des formulations en capsules.
» La nouvelle réglementation (européenne) impose un emballage extérieur opaque ou foncé, un conteneur refermable difficile à ouvrir par de jeunes enfants ainsi qu’un emballage soluble contenant un agent d’aversion incitant à recracher. »
Les emballages solubles complètement opaques ont été évoqués mais n’ont pas été retenus car l’attractivité de ce type de produits pour les enfant semble principalement venir de leur sensation particulière au toucher.
Les nouvelles prescriptions techniques sont d’application depuis le premier juin 2015. Les produits se trouvant déjà sur le marché ont pu être vendus jusqu’au 1er décembre 2015. Il est donc désormais interdit de proposer les anciens produits à la vente. Il faut toutefois noter que certains ont pu faire des réserves des anciens produits au vu des actions commerciales destinées à en vider les rayons avant le 1er décembre 2015. Il est donc tout à fait possible que les appels reçus depuis cette date par le Centre Antipoisons concernent également des produits ne répondant pas aux nouvelles dispositions techniques.
« Les produits se trouvant déjà sur le marché ont pu être vendus jusqu’au 1er décembre 2015. Il est donc désormais interdit de proposer les anciens produits à la vente. »
Nous devrons encore attendre certainement une année avant de pouvoir effectivement vérifier l’efficacité de la nouvelle réglementation en vigueur.
Si cette nouvelle réglementation ne se révélait pas suffisante pour prévenir ces accidents, la commission européenne s’est engagée à ré-ouvrir le dossier pour prendre d’autres mesures. C’est pourquoi la Belgique est particulièrement vigilante aux cas qui se présentent sur son territoire et que le SPF santé publique, sécurité de la chaîne alimentaire et environnement demande chaque année au Centre Antipoisons de faire une toxico-vigilance de ces produits. En cas de non diminution significative des accidents nous en référerions immédiatement à la Commission européenne.
« Si cette nouvelle réglementation ne se révélait pas suffisante pour prévenir ces accidents, la commission européenne s’est engagée à ré-ouvrir le dossier. »
Ces mesures réglementaires associées à une meilleure information du public devraient concourir à diminuer le nombre d’accidents. On pourrait par exemple insister sur le fait que les accidents concernent généralement des enfants de moins de 5 ans et qu’il faut dès lors éviter de les mettre en contact avec ces produits.
S. THORON